Les histoires de Mister Méta .... le Lachens 2007

 

Lachens 2007, Ce jour là mon VTT avait une âme

Jeudi 17 mai, jeudi de l'ascension, un jour miraculeux pour tous les Chrétiens de la terre... et si le miracle se produisait aujourd'hui encore !. Un éclair de puissance envahit ma robe blanche et noir à l'aube de cette date inoubliable, le jour où les dieux m'ont donné une âme. Cinq du mat, j'ai des frissons en ce petit matin de printemps. Thierry me balance dans la voiture avec la décalitesse d'un mec mal réveillé, les deux heures qui suivent seront les plus désagréables de la journée. Je me retrouve brinqueballé d'une voiture à une autre et je finis bousculé dans un camion durant deux plombes. Certes les gentils organisateurs m'ont emballé dans une douillette couverture mais les virages du haut pays Varois me font souffrir, les dizaines de copains qui m'accompagnent n'ont pas plus fier allure. J'ai même l'impression que certains datent de l'origine des temps du VTT et  j'ai une pensé emu pour eux en pensant à la sale journée qui les attends.
En fait, tout a commencé la veille au soir, lorsque Thierry me bichonne avec amour, me graisse les articulations, vérifie la pression de mes pneus et se refait à voix haute le film des
100 kms du Lachens/mer de l'année dernière. Certaines  pièces de mon prédécesseur qui m'équipent aujourd'hui raconte un peu ce qui m'attend dans cette première grande randonnée. Les endroits qui vont me secouer comme un prunier, les zones de récupérations et les moments de grandes solitudes lorsque le pilote en aura plein les pattes. Fort heureusement, Thierry a retenu des leçons du passé et sans me vanter, je suis le spad idéal pour ce type de Virée. My Name  is Méta 4, Commencal Méta 4 et fort de mon amortisseur de 100mm, de ma fourche 100/130, de freins et d'une transmission Shimano XT reglée au millimètre et surtout d'une selle SDG Bel Air très confortable, les rochers, les racines et les caillasses n'ont qu'à bien se tenir.
Je sors enfin du camion et dès que l'on m'enlève la couverture je ressens les frimas du petit matin. Le vent me fouette l'alu et l'altitude me fait chavirer les biellettes , 1720m, c'est la première fois que je monte aussi haut. Je vois Thierry se demmener comme un beau diable pour les dernières préparations. Il retrouve un groupe de copains, tous émoustillés par leur nouveau maillot VTT 83. Les hommes s'amusent d'un rien. Moi je reste avec mes habituels compagnons de balade, les Cannondales de Gérard et de Daniel, le Trek de Cyril et Spé de David. 

Quand commence t'on les choses sérieuses, ça pelle ici....
8h50, enfin les premiers tours de roues, la rapide traversée du plateau, histoire de faire chauffer un peu les articulations et la descente arrive, belle, roulante, rapide. Thierry a eu la bonne idée de libérer mon amortisseur pour plus de souplesse et les moyeux Hope commencent à chanter comme des grillons. Ca va vite, très vite et malgré quelques dérapages bien contrôlés par mon pilote, le plaisir monte crescendo. Il faudra tout de même que je lui explique que ses coups de patins violents m'arrachent la gomme et que c'est douloureux. Un jour, c'est promis, je décrocherai et il finira de freiner avec les genoux et les fesses, je pense qu'il comprendra.
Rapidement le premier problème technique de la randonnée arrive. L'un de nos nouveaux compagnons, un Lapierre tout neuf a crevé son Tubeless. Il faut avouer qu'on lui a monté des Michelin Xdry et que c'est une belle merde. Ils ont à tout cassé 25kms au compteur et sont déjà foutus, honte au Bibendum. Un gros embouteillage nous refroidi et je sens que mon pote Rush 1000, le VTT de Daniel, n'est pas à son aise. Nous aurons la confirmation un peu plus loin, son amortisseur a laché. J'assiste, impuissant, à la déception de son pilote qui n'a que pour seule alternative un retour aux Issambres par la route. Les roulements en berne, la malchance de notre ami nous laisse un peu orphelin.  Encore une crevaison de Lapierre et nous pouvons enfin recommencer à rouler. Ces petits retards dans l'allumage de cette journée ont eu l'avantage de nous libérer les petits sentiers qui rejoingnent Mons. Une petite merveille, les enfilades de lacets, les marches, les passages techniques, c'est mon domaine. Mon pilote a beau se prendre pour Nicolas Vouilloz, le pauvre n'y est pour rien. Si je n'étais pas là pour rattrapper ses erreurs de trajectoires, il aurait fini dans les buissons depuis belle lurette. Avant d'arriver au premier ravitaillement, j'ai droit à un grand moment de bonheur, un vrai portage sur les épaules de Thierry. Je me fais bien lourd, histoire qu'il comprenne que ses excès alimentaires ou que ses petits apéros me pèsent aussi tous les dimanches matins. 
Mons, Petite pause Café pour Thierry et son équipe de joyeux lurons. J'échange quelques propos avec leurs monture, le pauvre Lapierre a l'air désespéré, désolé de nous avoir fait perdre autant de temps. Les ennuis mécaniques font aussi parti de ce sport, nous ne sommes pas de bois. Un dernier regard bien triste à notre ami Rush que nous laissons définitivement partir seul sur le bitume et nous repartons de plus belle. La suite n'est pas forcément la plus amusante. La traversée d'un grand plateau calcaire où le sentier chemine au travers des rochers. Je ne sens pas très à l'aise sur ce type de terrain, un manque évident de nervosité qui me font rebondir de creux en bosses. De plus, Thierry reste sur un développement un peu trop haut, ce qui donne des reprises de rythme très brutales. 10 ans de VTT pour en arriver là, pas toujours fûté le garçon. Que cela ne tienne, tous ces efforts lui laisseront forcement des traces dans les jambes. Encore quelques kilomètres de routes et de pistes sympathiques et vallonnées sur les hauteurs de Seillans et nous retrouvons les petits singles que j'affectionne tant. Au passage, je remarque que Thierry a fait ces dernières bornes en sollicitant plus mes grands pignons et mon petit plateau et que mes habituels potes ont pris de l'avance, certainement le résultat du mauvais calcul de tout à l'heure. Le single se tranforme rapidement en grande piste  descendante et là, je dois rendre hommage à mon pilote, la vitesse et la glisse, il maîtrise. Je sens par moment les deux roues partir mais son sens de l'équilibre fait merveille. Encore une fois, je sens la gomme s'arracher dans chaque virage, tant pis, à chacun son style. Une ou deux ornières évitées de justesse, quelques caillasses qui viennent éclater ma belle peinture nacrée, des virages à la limite de la rupture, je sens que le bonhomme veut me faire sortir les tripes. Heureusement, ma fidèle compagne, une Rock Shox Révélation fait des merveilles pour amortir les premiers chocs et permettre aux autres éléments de suivre sans problèmes. Nous rattrappons les autres juste avant d'arriver au deuxième ravitaillement, petit repos pour tout le monde. Trop concentré sur le tracé, j'en oublie de regarder les paysages et d'humer les odeurs printannières qui nous ennivrent mais au dire de tous les pilotes qui papotent autour de moi en s'enfilant un sandwich et quelques bananes, tout n'est que ravissement, bonheur et plaisir. En parlant de ravitaillement, j'aurais aussi aimé quelques gouttes d'huile sur mes articulations et mes pignons mais je suis sur que cela n'a même pas effleurer l'esprit du lascar qui me secoue dans tous les sens depuis déjà 40 kilomètres. 
On nous annonce un peu de repos pour les 15 bornes à venir et surtout un col de 10 kms. Ca j'adore, rien à voir avec les sensations fortes de descentes mais de savoir que le mec que je porte va suer corps et âme pendant près d'une heure me réjouit. Moi, je vais me la jouer tranquille, peinard pendant que le gros d'en haut va regretter les petits gâteaux et les bières de la semaine. Sentir ces gouttes de sueurs me couler sur le cadre est presque jouissif. Dans la montée, le Cannondale Carbon de Gérard casse un rayon, ce dernier l'arrache sans état d'âme et repart, nous vivons dans un monde de brute. 
Comment ça ! nous sommes déjà en haut, J'ai à peine aperçu quelques goutelettes perlées sur son front, le bougre est en forme. Un bruit fuse comme une trainée de poudre au ravitaillement du sommet, j'aperçois quelques confrères tremblant de peur, la descente qui suit est annoncée très dangeureuse avec des panneaux de prudence tous les 200m. A mon avis, ça va secouer dur, Thierry, es tu sur de l'efficacité de nos freins?, car c'est un terrain de jeux pour notre équipe... En effet, ca fracasse dur, caillaisses, ornières, épingles, re-caillasses, re-ornières de plus en plus grosses, des pointes de vitesses oscillant entre 30 et 35 km/h, des trajectoires parfois aléatoires pour doubler et ce jusqu'à la crevaison du Spé à David. Une petite pause salutaire tant nous avons été sollicité durant ces quelques minutes de folie et surtout parce que deux énormes ornières traversent la piste un peu plus loin. Je ne suis pas certain qu'a notre vitesse nous y soyons passé sans heurt. En témoigne, notre ami Lapierre, parti un peu avant nous et qui a connu sa première gamelle dans l'une d'elle, eclatant au passage son Tubeless avant.
Les kilomètres qui suivent nous permettent de retrouver un peu de sérénité. Il me semble que l'an dernier, Thierry avait  souffert dans les vingts prochains kilomètres, peut être se méfie t'il un peu et qu'il en garde sous la pédale pour la dernière grosse difficulté du jour. Une petite halte au Château du Rouet et toujours  pas de gouttes d'huile sur mes pignons, Mon pilote a de la chance que je l'apprécie, il mériterais une petite casse de chaîne pour lui faire comprendre ce qu'est une véritable équipe. Nous sommes encore à 40 kms de l'arrivée, 20 de plat dans la vallée de Roquebrune, pas grand chose a en dire si n'est que nos amis ont l'air d'avoir mal aux jambes, aux fesses et que le vent violent qui traverse la plaine ne leur facilite pas la vie. Après tout, ils ont signé pour en baver, je ne vais pas les plaindre. Au contraire, ce petit train de sénateur me va bien, quelques ruisseaux a traverser qui me rafraîchissent les Tubeless. Belle invention, ces pneus quant ils sont de qualité et en bon état. Roquebrune sur Argens, dernière pause avant le final et toujours pas d'h..., non je vais arrêter de demander l'impossible à un égoïste. Par contre, lui s'enfile encore quelques sandwichs et des quartiers d'orange, on a le ventre qui gargouille pèpère ?... C'est vrai qu'il est le seul à faire des efforts !. 
Encore vingt kilomètres et c'est le final sur la plage. En plus vingt bornes peinard, ça ne fait pratiquement que monter, Les Maures et le Col du Bougnon au programme, un haut lieu du Roc d'Azur. David, le pilote du Spé a du mal dans cette dernière partie, Gérard et son Cannondale l'attendent et le soutiennent moralement, même si au passage, il lui fait sauter le tout dernier ravitaillement. Le Treck de Cyril a des ailes dans ces sentiers qu'il connait bien, je tente de le suivre mais Thierry craque dans le dernier raidillon, bel effort quand même mon garçon, j'aurais aimé t'aider un peu plus mais j'en ai aussi plein les jantes. Une dernière descente sur route et enfin la plage, la mer et les retrouvailles avec notre ami Rush, pauvre Daniel, sa déception et sa colère nous fait vraiment mal au coeur. 100 kms, c'est long, pas toujours bon mais quelle satisfaction et quelle fierté lorsque tu m'as porté tel un trophée sur les dernières marches d'escalier avant la banderole d'arrivée. Je te laisse ton diplôme de finisher, tu l'as bien mérité, je garde la plaque n°62 que s'afficherai,  fier comme Artaban, dans mon petit cabanon, juste à coté de la burette d'huile...

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